vendredi 16 mars 2012

La Colère d'un fossé


La Colère d’un fossé est une histoire d’amour. Un amour en décomposition. L’histoire de deux personnages en crise. Un fossé s’immisce lentement entre eux. Le fossé qui les pousse à bout, au bout de leur être, jusqu’à les priver de toute possibilité de dialoguer. Deux personnages sans nom, numérotés : 1 et 2. Qui sont-ils ? De quoi parlent-ils ? Une crise de nerfs, une rage qui fait éclater leurs émotions, qui expose leurs conflits intérieurs à la vue d’autrui. À la vue d’un autre cloisonné dans une prison aux barreaux invisibles. Terrorisés par le vide, ils parlent au bord d’un gouffre qui les empêche d’échanger leur amour.
Leur dialogue est en morceaux, il ne reste plus que des échos entre deux monologues, comme si leurs paroles se heurtaient aux parois du fossé avant de pouvoir atteindre l’autre. La pièce n’est pourtant pas un sombre constat sur la possibilité ou l’impossibilité de communiquer dans notre société. C’est surtout une tentative de réinventer le dialogue. Utiliser la poésie pour dépasser les codes de la narration et communiquer par les sentiments. Roland Barthes a écrit que « La poésie moderne [...] détruit la nature spontanément fonctionnelle du langage et n’en laisse subsister que les assises lexicales. Elle ne garde des rapports que leur mouvement, leur musique, non leur vérité. »
Ce n’est pas la signification des mots qui atteint l’autre, mais l’émotion provoquée par l’image véhiculée. Comment se faire entendre dans un monde envahi par les moyens de communication ? Parler jusqu’à en devenir fou, hurler jusqu’à l’épuisement, murmurer pour ne pas mourir. L’ « extimité » révélée de 1 et 2, (c’est-à-dire « le mouvement qui pousse chacun à mettre en avant une partie de sa vie intime, autant physique que psychique. [...] Il consiste dans le désir de communiquer sur son monde intérieur» Serge Tisseron) comme mouvement nécessaire au rétablissement de leur lien harmonieux. Parler avec le cœur, les sentiments : bref, le corps. 



"1- Ce jour où elle a passé la porte j'ai compris que tout était perdu. Qu'avant de tout recommencer il faudrait tout détruire.
Démolir les routes. Les serres de tomates et d'oranges en plastiques au goût de kérosène quelquefois.
2- Si les bavardages cessent peut-être pourrons-nous nous entendre sur l'exquise mère."

La Colère d'un fossé